Vendredi 20 février.
4ème jour en mer et que de péripéties!! Beaucoup de gens
ont eu le mal de mer comme je vous l’ai déjà raconté mais j’ai surtout plaint
les employés qui n’ont pas la possibilité, je dirais même le droit de
s’asseoir. Apparemment même les plus anciens ou les plus aguerris ont souffert.
Hier ça s’est calmé un peu pour reprendre aujourd’hui. Mais au moins il fait
beau et chaud, le soleil brille et le ciel et l’océan sont bleus. C’est
agréable de revoir le soleil après 2 semaines de grisaille.
Les péripéties concernent également la connexion internet
qui est complètement interrompue depuis 2 jours. J’ai eu de la chance de
pouvoir mettre l’article sur Valparaiso avant-hier, aujourd’hui il n’y a
toujours pas de connexion et pas de télé non plus, nous sommes pour le coup
complètement coupés du monde. On pourrait être les seuls survivants après une
catastrophe naturelle ou pas…un peu comme « l’Arche de Costa »…quelle
horreur ! D’habitude on peut avoir quelques infos sur France 24 mais nada,
niente, nothing, rien, je ne connais pas le mot en Allemand sinon je l’aurais
mis aussi pour être dans la tradition Costa… Mais il n’est que 12H, j’ai
toujours l’espoir que ça s’arrange en fin de journée. Sinon vous ne lirez ce
texte que Dimanche ou à la saint Glinglin...
Au fait, nous avons maintenant 6 heures de décalage avec
vous. Nous sommes dans le même fuseau horaire que New York où Olivier et
Fanette seront dans quelques heures, ou que Montréal ! Coucou les amis
canadiens !
Demain nous serons sur l’Ile de Pâques, une des escales
que j’attends avec impatience. Lorsque les excursions ont été ouvertes aux
réservations, Lundi soir, nous avons décidé de ne pas en prendre, sachant que
l’île est petite, et que nous devions accoster au nord est, près d’un site.
Mardi matin nous nous sommes félicités car la queue pour les réservations était
longue d’une centaine de personnes sinon plus ! D’ailleurs à midi il ne
restait plus de places pour aucune excursion !
Puis nous avons commencé à paniquer. Je devrais dire John
a commencé à stresser, à s’inquiéter tellement qu’il n’en a pas dormi de 2
nuits ! Bref, tout d’abord nous avons appris au cours d’une conférence,
que le bateau allait accoster dans une crique au niveau du seul village de
l’île, ensuite qu’il fallait payer une taxe de 60$ US par personne, droit d’accès
aux sites. Naturellement, nous n’avons pas de dollars, nous avons des euros et
il nous reste quelques pesos chiliens. Donc, vite, vite, je vais à la réception
et Hourra ils peuvent nous changer des euros en dollars ! Ils
prennent 4€ de commission (« fair enough » comme on dit en anglais,
ce qu’on peut traduire par « c’est de bonne guerre » !) mais le
taux de change nous a sciés : 1,08$ pour un 1€ ! Soit Costa
s’engraisse sur notre dos, soit l’Euro a fait une chute vertigineuse depuis
début Janvier. Ce qui semble probable après avoir lu un article dans une copie
du Monde que John a trouvée !
Bon, nous avions réglé le problème des dollars. Il nous
restait à être sûr de trouver un taxi pour nous promener dans l’île. C’est ça
qui angoissait John. L’île est peu peuplée et « tous les moyens de
transport vont être confisqués par Costa… ». Ce matin autre raison
d’angoisser : comme chaque fois que nous accostons en chaloupe, la
descente est organisée en premier pour les gens qui ont une excursion, ensuite
ceux qui ont décidé comme nous de se débrouiller seuls, doivent retirer la
veille un ticket d’embarquement numéroté. Le jour même, on nous annonce par
haut-parleur les numéros qui peuvent embarquer. Vous avez compris que les
premiers numéros sortent les premiers. Ce matin, John a commencé à faire la
queue pour ces fameux tickets, à 7H30, sachant que la distribution ne
commençait qu’à 8H. Et bien, il y avait déjà plusieurs centaines de personnes
qui attendaient, certaines, je l’ai appris plus tard, depuis 6H du matin…Il a
obtenu le numéro 72. Donc Crise, la visite de l’Ile de Pâques va être un fiasco
total…Nous allons arriver à terre après tout le monde et tous les taxis seront
déjà pris ! Je me suis dit qu’il avait probablement raison ! Finalement
j’ai décidé à tout hasard de faire la queue devant le bureau des excursions et
de demander s’ils avaient quelques places pour une excursion dans une autre
langue que le Français. Après tout on avait prévu de se débrouiller sans guide.
Au bout d’une heure j’ai poussé un grand OUF de soulagement ! J’ai pu
réserver une excursion Costa en Anglais et en plus sur des sites qui nous
intéressent ! Du coup, tout le stress de John est retombé ! Tant
mieux !
Vendredi 20H45.
Toujours pas de connexion internet, comme vous le saurez
en lisant cet article plus tard. Ce n’est même pas sûr que ça fonctionne
Dimanche. Demain vous comprenez que nous
aurons eu d’autres préoccupations !
Je pense que vous aurez 2 articles pour le prix d’un,
puisque nous vous raconterons notre visite de la mythique Ile de Pâques.
Il y a des lieux comme ça qui font partie d’un rêve
collectif, c’est le cas du Cap Horn, de Tahiti, pour nous Français en tout cas,
du lac Titicaca qui nous faisait pouffer en douce quand nous étions gamins en
classe et puis l’Ile de pâques. Jamais je n’aurais imaginé y venir un jour et
puis demain ce sera fait ! Quelle chance on a ! C’est ce qui me met
en colère contre certains passagers qui sont impolis, mal élevés, vous
bousculent à la sortie des ascenseurs ou dans les couloirs pour être les
premiers, où ? On ne sait pas, de toute façon le bateau est un lieu clos… Qui
se plaignent pour tout ou n’importe quoi, de la nourriture en particulier, ça,
ce sont surtout les Français… Se rendent-ils compte ces gens là combien ils
sont privilégiés ? Malheureusement, je connais la réponse ! La
plupart devait être de jeunes grincheux, maintenant ce sont de vieux
grincheux ! (et encore je suis polie ! je vous laisse subodorer le
mot que j’ai en tête !!!)
Bon j’arrête là, demain je vais vivre un rêve de
gosse ! Et je vous raconterai dès que nous aurons à nouveau une liaison
avec le monde extérieur !
Bises.
M.Christine et John
Samedi soir : Comme prévu, toujours coupés du monde. Je vous
raconterai l’île de Pâques dès que je pourrai. Je ne sais pas s’il me reste
suffisamment d’adjectifs pour décrire les merveilles que nous voyons.
Dimanche 22/02 : Toujours rien en vue ! Mais j’ai une angine et
donc ai eu l’immense honneur de rencontrer le médecin du bord ce matin. Ce
n’est pas le médecin de « La Croisière s’amuse » dont j’ai oublié le nom,
mais il porte aussi un uniforme et demande 62€ pour une consultation… Si j’en
parle à mon médecin traitant en rentrant, elle va surement se remettre en grève
pour réclamer une augmentation de ses honoraires…
Lundi 23/02 17H45 : Hourra ça marche ! Nous sommes enfin connectés
avec le monde.
Nous avons maintenant 8H de décalage horaire avec vous.
Nous gagnons encore une heure cette nuit. En fait nous reculons nos montres
tous les soirs de 1h.
Demain nous serons en transit à l’île de Pitcairn à
environ mi-chemin entre l’île de Pâques et Tahiti. Nous devons mouiller au
large et une délégation de l’île va monter à bord. Vous vous souvenez de
l’histoire des Révoltés du Bounty? Et bien c’est sur cette île qu’ils ont
finalement accosté en 1790 avec leurs femmes tahitiennes, et depuis leurs
descendants continuent d’y vivre. Aujourd’hui ils sont 65 à y vivre ! Il
vaut mieux s’entendre avec ses voisins ! Vous souvenez-vous du film avec
Marlon Brando (quand il était encore jeune et beau…) dans le rôle de Fletcher
Christian le second du Capitaine Bligh (sans T !!) qui a pris la tête de
la mutinerie ? Pour ceux que ça intéresse, à vos cassettes, vos DVD, ou
pour faire plus moderne, vos téléchargements légaux ou pas, mais attention, ADOPI
guette…N’est-ce-pas Sarah ?
Tout à l’heure John est allé faire son jogging quotidien
sur le pont 3, et comme tous les jours il a croisé le commandant du Deliziosa.
Il a décidé de s’arrêter et de lui raconter en un résumé très succinct,
l’histoire de sa famille. Vous connaissez John, il va droit au but. Donc je
vous rapporte le court échange entre le commandant Serra et John, tel qu’il me
l’a raconté. Ca se passe en Anglais.
John : Buongiorno commandant (n’oubliez pas que John
prend des cours d’Italien !). Mon nom de famille était Bligh, mais au
cours du 19° siècle, un de mes ancêtres a rajouté un T. et nous sommes devenus
Blight.
Le commandant tapant dans le dos de John (Je vais le faire
en anglais, la traduction ne donne pas le même ressenti !) : Good for
you !
Et voilà, c’est terminé ! Il a continué son
chemin ! Soit il a pensé qu’il avait à faire à un malade qui l’arrêtait
pour lui parler de sa famille, soit il a compris le message et s’est dit qu’il
n’avait pas du tout envie de l’inviter à rencontrer la délégation de Pitcairn
demain ! C’était en fait l’arrière-pensée de John !
Finalement on n’a pas le temps de s’ennuyer sur ce
bateau… !!!
Maintenant l’île de Pâques. Rapa Nui (la Grande Rapa
parce que des habitants de l’île de Rapa, plus petite, en Polynésie française
sont venus s’y installés).
D’abord un peu d’histoire si ça ne vous ennuie pas !
(sorry Samira !!) Les habitants de l’île seraient en fait venus des îles
Marquises et ont perpétré sur leur nouvelle terre, le culte des ancêtres qui
était leur religion d’origine. Les fameux Moaï sont une représentation des
ancêtres et sont tournés vers la terre pour protéger les villages. Ils sont
posés sur des « Ahus » qui sont des plateformes cérémonielles. Leur
société était en fait très hiérarchisée, en schématisant, il ya avait en haut
de l’échelle, les « seigneurs » qui faisaient respecter les
traditions et donc la construction des Moaï et en bas, les esclaves qui
trimaient pour les fabriquer et les transporter. Les statues étaient découpées
dans une carrière sur le flanc d’un volcan (Rano Raraku) et ensuite
transportées au moyen de troncs d’arbres, principalement des palmiers, avec
lesquelles ils les faisaient rouler, ou glisser certains pensent debout, jusqu’au
site qui devait les accueillir.
Les archéologues pensent qu’à un moment donné, aux
16°/17° siècles, une crise environnementale a eu lieu à cause de l’érosion des
sols. Trop d’arbres avaient été coupés. Ils pensent aussi qu’il y a eu une
période de sécheresse, et la famine s’est installée. Et comme les seigneurs
intensifiaient la construction des Moaïs pour implorer les ancêtres, la
population s’est révoltée, des luttes tribales ont décimé la population et ont
fait vaciller l’assise religieuse de la société. Une nouvelle religion a pris
le dessus. Le culte de Make-Make, la religion de l’Homme Oiseau. C’est vers
cette période qu’apparemment l’île a été découverte par le navigateur
hollandais Jakob Roggeveen. Les gens mourraient de faim et l’île était
complètement déboisée. Les habitants n’avaient même plus de bois pour fabriquer
un bateau et partir. C’était le Dimanche de Pâques 1722, et il l’a baptisée
ainsi. (« Paaseiland »). Elle a changé plusieurs fois de nom mais
finalement les Polynésiens l’appellent Rapa Nui et le reste du monde l’Ile de
Pâques. Je trouve que c’est une histoire triste. Je passe sur beaucoup de
détails mais vous pourrez trouver plein de renseignements intéressants sur
Wikipedia.
Nous sommes descendus à terre à 8H30 et avons visité 3
des 4 sites les plus importants de l’île. Le premier se trouvait très près du
village qui compte 5000 habitants, où nous avons accosté. Ensuite un deuxième
site où se trouvent 15 statues qui avaient été complètement renversées en 1960
lors d’un tsunami. Les différentes parties ont été retrouvées et les
statues reconstituées grâce à des photos
antérieures. Puis nous sommes allés à ce
qu’ils appellent l’atelier des Moaï. Il s’agit d’un ancien volcan (Rano raraku)
dont je vous ai parlé plus haut, que les lointains habitants de l’île avaient
transformé en carrière où ils fabriquaient leurs statues. Il y a environ 400
Moaï sur l’île et autant dans la carrière à différents stades de fabrication.
Le dernier site que nous aurions aimé voir est constitué
de 7 Moai qui font face à la mer. Ce sont les seuls. Apparemment ils
représentent 7 ancêtres regardant en direction de la Polynésie.
Les Moaï ont différentes tailles, mais ils n’ont pas de
pieds. Ils ont une tête et un torse sur lequel reposent leurs mains. Sur leur
tête se trouve une pierre d’une autre roche volcanique, en générale rouge, qui
s’appelle un « pukao », sorte de chapeau mais qui en fait assure la
stabilité de la statue. Leurs yeux sont faits de coquillages. L’érosion a fait
son œuvre dévastatrice et peu ont encore leur « pukao » sur la tête
et ceux qui ont des yeux ont été restaurés.
Malgré tout, on reste émerveillés devant ces géants d’un
autre âge et d’une civilisation perdue. Peut-être que nous devrions nous en
souvenir aujourd’hui et éviter de détruire non pas une île mais la planète
entière. L’île de Pâques est peut-être un exemple à ne pas suivre…C’était ma
minute écolo…
J’espère qu’internet fonctionne toujours et que je vais
pouvoir poster cet article.
Demain ou après-demain suivant le réseau disponible, je
vous parlerai de notre rencontre avec les descendants de Fletcher Christian.
Bises à toutes et tous.
Message personnel à Constance : Joyeux
anniversaire !
M.Christine et John
John will write tomorrow about Easter Island and Pitcairn. We have been without an internet connection for nearly a week!
Lots of love. xxxxxxxxxxxxxxx
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Site de Tahai. |
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5 Moaï un peu plus endommagées |
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Contraste... |
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Vue de profil... |
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Site de 15 Moaï Tonariki. |
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Une tête renversée après le tsunami de 1960. Je pense qu'on disait raz de marée à l'époque... |
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Les "pukao" au sol. |
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Impressionants! |
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Sur les flancs du volcan Rano Raraku. |
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Celui-ci est encore encastré dans la roche. |
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Un grand Moaï de 2015... |
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Vue sur le site précédent. |
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Le seul qui soit à genoux! |
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Photo du site précédent... |
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y aurait-il une ressemblance? |
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Paysage volcanique de l'île. |
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En bord de mer à nouveau, on voit bien ses mains sur son ventre. |
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Différentes vues de l'île. |
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On distingue bien le Ahu, la plateforme cérémonielle. Celui-ci se trouvait près du lieu de débarquement des chaloupes. |
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Cette photo devrait se trouver plus haut. Un Moaï encore encastré dans la roche dans la carrière. |